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Des talents, des adresses, des personnalités, des événements, chaque vendredi midi, de nouvelles raisons d’aimer le Sud.

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Par Luc Clément
19 avr. · 6 mn à lire
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J-3 avant le Jour de la Terre

Où l’on parle de thérapie safranée, de l’art du design plastique, de pain de bonne graine (sans ivraie), de cosmétique propre pour bébé heureux et d’autres bonnes nouvelles du Sud.

Pour toutes celles et ceux qui pensent que l’écologie nous fait une belle jambe, lundi 22 avril, consacré Jour de la Terre, se présente comme une opportunité intéressante. Car la réflexion, cette année, porte sur nos déplacements. Mobilisons donc triceps sural, en l’espèce muscles soléaire et gastrocnémiens, activons ischio-jambiers, biceps fémoral, semi-tendineux et semi-membraneux au diapason et développons de concert quadriceps en 4 mouvements de vastes fémoral, latéral, médial et intermédiaire. Marchons, marchons, donc, qu’un sang plus pur remplace les hydrocarbures (au moins pour aller acheter le pain).

La belle histoire de la semaine
Naali. Safran du collier

Si vous avez lu le Shennong bencao jing ou à peu de choses près Classique de la matière médicale du Laboureur Céleste, vous savez déjà que le safran figure en bonne place au nombre des plantes que recense cette bible chinoise des drogues naturelles compilée – clament les laudateurs de l’empereur Chen Nong – 2 700 ans avant notre ère. Une datation largement exagérée, exemple flagrant de proto-propagande sinocentrique, et qui ne saurait masquer le fait que la précieuse épice a d’abord été cultivée en Méditerranée, comme en atteste la très sérieuse mythologie grecque – le safran rouge originel ayant fleuri du sang versé par le dénommé Krokos, blessé à la tête lors d’un tournoi de lancer du disque au côté du dieu Hermès – ou encore une antique fresque minoenne polychrome découverte à Knossos en Crète. Alexandre le Grand en aurait d’ailleurs fait de fréquents bains censés guérir ses blessures, accroître sa force impériale et repousser les frontières.

Grand est ainsi le prestige du safran, plus encore le prix de cet or rouge (dont le kilo se monnaie le prix d’une Volkswagen Golf toutes options), justifié par l’infini soin apporté à la production d’une plante miraculeuse qui, sans l’homme, n’existerait pas. Au fil des siècles, de nombreuses régions du monde en ont développé la culture et revendiqué la meilleure qualité. Interrogez donc Abde­rha­man Nour Ebad, Nadir Tayach et Karim Boucenna, ils vous diront que le meilleur est aujourd’hui cultivé, contre toute adversité et selon les méthodes les plus traditionnelles, en Afghanistan. Un safran rouge de catégorie 1, certifié ISO 3632 par l’International Taste Institute de Bruxelles. Pourquoi diable les 3 amis lyonnais, frais émoulus du programme Entrepreneurs dans la Ville d’EM Lyon, se sont-ils pris de passion pour le safran afghan ?

Avisés des bénéfices pour la santé des précieux pistils, ils ont décidé de lancer leur start-up sur le créneau disruptif de la Safranothérapie, discipline qu’ils ont inventée et défrichent en développant leurs gammes de compléments alimentaires. Des formulations originales, fondées sur les ressources anti-âge, anti-inflammatoires ou anti-stress tirées – selon une méthode d’extraction moléculaire exclusive – des principes actifs de la plante (safranal, crocine, crocétine et autre picrocrocine aux sonorités plus proches de Rabelais que du Vidal) auxquels on peut ajouter à l’avenant bonne influence sur la santé mentale, soulagement du syndrome prémenstruel ou encore réveil de la libido.

Leur créativité galénique, qu’illustrent gummies anti-stress, collagène marin au safran, crème visage spéciale cycle menstruel ou masque de nuit rééquilibrant, s’augmente plus encore d’une vision d’entrepreneurs en quête d’impact positif. Car les bienfaits du safran, ils ont d’emblée décidé de les mettre à profit pour guérir les maux de la société afghane, terre natale d’Abderhaman. Promouvoir la culture du safran à forte valeur ajoutée permet de soutenir une économie agricole locale et vertueuse, en faisant reculer les cultures génératrices de trafic (en clair, la drogue). Mais aussi de dégager des profits pour défendre l’accès des femmes afghanes à l’éducation en soutenant Code to Inspire, la première académie de codage pour filles à Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan. Longue vie donc à Naali qui soulage nos bobos occidentaux en repoussant les talibans.

La Safranothérapie par Naali © DRLa Safranothérapie par Naali © DR

Nos Repérages Hebdo
Lune pour l’autre. Beauté donnée 

À l’heure où les grandes puissances spatiales relancent la course à la lune, dans le fol espoir sans doute d’exploiter une planète B, Blandine Gayaud garde les pieds sur terre. En l’occurrence, celle de sa région natale et de cœur, les Hautes-Alpes. Une terre dont les plaines et les montagnes regorgent de ressources naturelles qui lui ont inspiré une marque de cosmétique exemplaire, capable d’offrir de la beauté en partage. Le bon lait d’ânesse des producteurs locaux dispense ses vertus apaisantes et régénérantes, associé au miel de montagne des Alpes certifié médaille d’or et, sensiblement plus exotique, au beurre de karité. En revanche, les graines de grenade au pouvoir antioxydant dont Blandine a fait l’ingrédient innovant et suractif de sa gamme bio s’avèrent 100% endémiques, récoltées au soleil de Provence. Décidée à donner le meilleur de la nature haut-alpine et d’elle-même, la jeune femme a placé sa marque Lune pour l’autre sous l’égide protectrice de l’astre féminin, témoignant d’un engagement qui parle de confiance, de sororité et de solidarité. La vraie beauté est celle qui se partage.

Gammes au lait d'ânesse et miel de montagne, ou grenade de Provence bio de Lune pour l'autre © DRGammes au lait d'ânesse et miel de montagne, ou grenade de Provence bio de Lune pour l'autre © DR

Plastic & fils. Polymère d’invention

Les moins jeunes d’entre vous se souviennent sans doute qu’au mitan des années 80, Plastic s’appelait Bertrand. À l’époque, bien sûr, ça planait pour lui, dans la lancée des glorieuses sixties où le plastique fleurait bon la modernité colorée et le bonheur pop à bon marché. Aujourd’hui, cet enthousiasme s’est franchement refroidi, spécialement dans les milieux marins qui voient chaque année un demi-million de tonne de déchets plastiques ajouter au désastre (si vous n’avez pas idée de ce que cela représente, allez donc faire quelques brasses dans l’Atlantique entre Hawaï et la Californie, où le sinistre 8e continent de plastique couvre une surface équivalente à 3 fois la France). Moins héritiers de Joe Colombo ou d’Anna Castelli Ferrieri qu’enfants de la tendance actuelle du design post-industriel, Chris Belmonte et Dylan Casasnovas ont retourné le problème en endossant, avec leur studio de création et pragmatisme, l’identité de Plastic & fils. Leur crédo, faire des déchets plastiques une matière de qualité, solide, durable et réutilisable. Démonstration, leur étagère Dapple en Polyéthylène Haute Densité recyclé, qui équivaut à 20 kg de plastique extirpés de nos eaux bleues et plages méditerranéennes. Autre exemple, Sea You, poubelle conçue pour l’espace urbain habillée de tuiles plastiques recyclées et recyclables, fabriquées à l’aide d’un four solaire pour garantir un impact réduit et mieux recueillir les déchets. Entre une planche à découper effet faux marbre créée pour le Youtubeur Whoogy’s, une collab’ avec la Villa Noailles et une sculpture mutante de flamant rose pour la Métropole Toulon Provence Méditerranée, les deux plastic boys se prêtent à tout projet sur mesure. C’est fantastique.

Étagère Dapple et mobilier urbain Sea You en PEHD recyclé de Plastic & Fils © DRÉtagère Dapple et mobilier urbain Sea You en PEHD recyclé de Plastic & Fils © DR

Mitron Bakery. Le pain de la vie

Le pain symbolise la vie. Le vrai, le bon, l’artisanal s’entend, pas celui qui fleurit aux ronds-points périphériques ou se démoule minute des terminaux de cuisson sur étagères calibrées. La bonne ville de Nice peut donc témoigner d’un regain de vie, particulièrement depuis que, début avril, Mauro Colagreco a décidé d’y implanter Mitron Bakery, sa boulangerie de chef superlatif, initiateur de la gastronomie circulaire et ambassadeur de la biodiversité. Sur son étal du Cours Saleya, ses pains bio au levain naturel sont bien vivants, remettant au goût du jour des blés ancestraux dont les parfums réveillent une culture millénaire oubliée. Celle-là même qu’à quelques encablures de là s’emploie à faire renaître avec talent et conviction Dominika Zielinska dont le fournil gourmand attire les connaisseurs qui viennent parfois du Var voisin faire le plein de ses spécialités artisanales. Comme d’autres font la queue chez Pompon, divine surprise dont le succès, qui ne refroidit pas depuis son ouverture dans le quartier populaire de Riquier, démontre que le bon pain n’est pas réservé à un microcosme de fashion foodistes versatiles. Un compagnonnage (du latin cum panis, avec qui on partage le pain, vous avez la réf ?) qui ne serait pas complet sans Mama Baker, le précurseur de ce renouveau niçois ouvert en 2015, qui revendique une boulangerie épicurienne, reflet de ce retour à la vie du plus essentiel de nos aliments.

Les pains vivants de Mitron Bakery © Matteo CarrassaleLes pains vivants de Mitron Bakery © Matteo Carrassale

Pototam. La formule magique de la clean baby cosmétique

Jeunes parents, Manon et Xavier ont décidé un jour de se mettre dans la peau des enfants pour dire stop aux produits de soins de puériculture, en apparence bienveillants mais, dans les arcanes de leur composition, chargés en ingrédients détestables et vilains perturbateurs endocriniens. Ils ont pour cela emprunté leurs mots, en l’occurrence Pototam, qui évoque vous l’aurez compris le mammifère amphibien cher à leur fille cadette, voire le grand badaboum que la vague clean actuelle promet à l’industrie cosmétique peu scrupuleuse. Ils ont surtout utilisé leur philosophie : faire simple, direct et naturel. Au menu donc, huiles végétales, beurres végétaux, un peu d’huiles essentielles et basta. Juste le nécessaire pour faire du bien, dans des contenants en verre 100% recyclable ou en bois et sans suremballage. Le tout fabriqué en France sous l’œil attentif de madame, psychologue diplômée, experte en médecine traditionnelle chinoise, et de monsieur, ingénieur chimiste spécialisé en formulation cosmétique. Roll-on anti-bobos, baume visage universel qui marche aussi pour les mamans, huile de massage pour le corps et autres innovations super clean vous attendent sur leur e-shop. Magique.

Shazam et Pototam, bébé est protégé © DRShazam et Pototam, bébé est protégé © DR

Notre Sélection Culture

Derrière sa stature d’éminent collectionneur d’art, Yvon Lambert cache une attirance de toujours pour les objets insolites, issus de la culture populaire provençale. La rencontre de sa collection avec celles du Mucem est si riche qu’un dialogue sensible et vivant s’instaure d’emblée entre œuvres d’art et pièces vernaculaires. De Basquiat à Édith Piaf. Passions partagées. La Collection Lambert au Mucem, jusqu’au 23 septembre.

Empruntant son titre à Jacques Rancière, l’exposition Le Partage du sensible à la Fondation Hartung Bergman révèle les affinités artistiques et amicales qui unissaient le couple à Terry Haass. Une artiste tchèque qui partagea avec Anna Bergman une même démarche sur le fil de l’abstraction et connaît aujourd’hui une juste reconnaissance. À découvrir jusqu’au 27 septembre.

D’Henri Michaux à Tomi Ungerer, à qui cette seconde édition est dédiée, le Festival du dessin d’Arles explore sous toutes ses formes une pratique longtemps considérée comme secondaire et qui jouit avec lui d’une authentique reconnaissance. Vive le dessin. Du 20 avril au 19 mai dans toute la ville.

Urbain Olie, Chef-d’œuvre sabotier, 1875/1900, Mucem © Marianne KuhnUrbain Olie, Chef-d’œuvre sabotier, 1875/1900, Mucem © Marianne Kuhn

Nos Actus Soudaines

À partir d’aujourd’hui, une nouvelle déambulation immersive et spectaculaire dans les Carrières des Lumières aux Baux de Provence vous conduit de Khéops à Ramsès II à travers la fascinante Égypte des Pharaons (et sans passer par IAM). Un voyage plus vrai que nature à s’offrir en famille.

À Mougins, la nouvelle galerie ABCD inaugure ses cimaises pas plus tard que ce soir avec une sélection d’œuvres emblématiques de JonOne, graffeur légendaire issu de la scène new-yorkaise des années 80 et installé en France (on connaît tous sa fresque parisienne en hommage à l’Abbé Pierre).

À Carpentras, la Bibliothèque L’Inguimbertine réveille l’esprit des Lumières. Fondée en 1745 par Monseigneur D’Inguimbert et installée en majesté dans les 10 000 m2 restaurés de l’Hôtel-Dieu de Carpentras au terme de 15 ans d’efforts, la bibliothèque-musée L’Inguimbertine fait dialoguer le livre et les œuvres, la culture, la mémoire et l’humanisme. À voir et fréquenter absolument dès demain.

Exit Bàti Bàti, place à Baga collectif, qui ambitionne de fédérer les acteurs et actrices de la mode durable dans le Sud. Antenne marseillaise du mouvement Fashion Revolution, dont c’est la semaine, le collectif propose demain de 14 à 18h une action intitulée Mend in Public qui invite le public (vous) à s’initier aux techniques qui prolongent la vie (et le plaisir) d’un vêtement. Rendez-vous à la Recyclerie O’Local et Au comptoir du livre, situé 47 rue des 3 Frères Barthélémy, quartier Cours Julien/La Plaine.

Le nom est génial, l’idée tout autant : jeudi 25 avril, 17h, rendez-vous Place de Rome à Marseille pour La soupe impopulaire, un dîner cuisiné et offert aux passants par des sans-abris que l’association La Cloche, par ce renversement des rôles, contribue à désinvisibiliser et valoriser. On y court (et on s’en veut de n’avoir pas parlé de celle organisée à Nice en janvier dernier par l’indispensable Forum Jorge François).

Enfin, on réserve séance tenante notre agenda pour la nouvelle édition du Refugee Food Festival. Débarquée l’an passé sous le soleil azuréen, elle s’étend désormais, du 12 au 16 juin prochain, à tout le Comté de Nice et associe restaurateurs engagés et chef·fes réfugié·es dans une nouvelle célébration de la table comme instrument pour refaire société. Parmi le programme, que nous détaillerons très bientôt, une attention particulière pour La Petite épicerie de Saorge au cœur de la Roya et des réflexions qu’active le festival : migration, cuisine et humanité.

Et pour finir, notre bonus musical de la semaine, une façon somme toute civilisée de se trémousser en philosophant sur le réchauffement des océans. Enjoy!

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