SUDNLY

Des talents, des adresses, des personnalités, des événements, chaque vendredi midi, de nouvelles raisons d’aimer le Sud.

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Par Luc Clément
3 mai · 7 mn à lire
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Retour de flamme

Où il est question de fesses épanouies et de pieds en liberté, d’anti-mode joyeuse, de cuvée philharmonique, d'holisme malgache et d’autres bonnes nouvelles du Sud

Depuis 2017, à la force de ses petits bras musclés, l’association Clean My Calanques nettoie inlassablement le littoral et, en particulier comme le souligne son patronyme, ses zones les plus sensibles. On peut en déduire, sans grand risque de se tromper, qu’elle présente un ensemble musculaire coracobrachial, brachial, biceps et triceps brachial en bon état de marche, voire tout à fait affûté. Ce qui aurait dû, en toute logique, lui permettre de porter haut, fier et sans effort la flamme olympique qui bientôt baignera de son aura universaliste la cité phocéenne. Pas du tout. Les responsables de l’association ont fait savoir, après mûre réflexion, qu’ils déclinaient l’honneur qui leur était offert. Car on peut avoir des bras, un cerveau et des convictions, surtout lorsque l’on s’emploie à nettoyer les déchets des autres. En l’occurrence, l’autre se nomme Coca-Cola, sponsor officiel des JO Paris 2024 et accessoirement l’un des principaux responsables de la pollution plastique dans le monde. Lestée de millions de tonnes de polyéthylène téréphtalate, ladite flamme, même signée Mathieu Lehanneur, devenait importable. Saluons donc l’éthique inflexible de Clean My Calanques, de ses esprits libres et courageux qui ont su résister à la gloire éphémère et dérisoire d’un post triomphal sur les réseaux sociaux au regard de l’enjeu que représente leur engagement. Puisse la torche d’Olympie les éclairer en retour et diffuser sur son sillage un peu de la conscience écologique du peuple grec qui agit aussi pour protéger la Méditerranée.

La belle histoire de la semaine
Hööf. Peace, love and sabot

Mars 1811, Nottingham, East Midlands, Angleterre. La nuit est fraîche mais une foule active se bouscule dans l’obscurité. Au petit matin, 50 métiers à tisser, bijoux de mécanique, sont découverts réduits en pièces dans les ateliers de la ville. On soupçonne alors les ouvriers textiles, dont la manifestation contre les conditions de travail engendrées par la Révolution Industrielle naissante a été durement réprimée la veille. S’ensuivent une série de missives signées d’un mystérieux Ned Ludd, toutes adressées aux patrons des sociétés textiles et qui les menacent de nouvelles destructions de machines. Si l’épisode signe clairement le point de départ de la célèbre révolte des Luddites, plus obscure en revanche est l’origine du mot sabotage, qui lui est étroitement associé et dont l’idée fera florès à travers l’Europe, au gré des luttes syndicales qui grondent et des conflits armés à venir. D’aucuns pensent que les sabots des ouvriers, introduits dans les mécanismes, auraient servi à les détruire. D’autres évoquent la tradition des typographes, qui consistait à jeter dans une poubelle en forme de sabot géant les caractères en plomb mal fondus ou inutilisables. D’autres enfin parlent du bruit assourdissant que feraient les sabots de bois, heurtant de concert le pavé de la vindicte sous lequel point de plage.

Plus pacifique bien que gentiment contestataire, le sabot suscite, dans les années 1970, l’engouement d’un véritable phénomène de mode, porté par l’attraction qu’exerce alors sur les jeunes générations de hippies allègrement fleuries le modèle social suédois. Faites l’amour, pas la guerre, mais avec des sabots. Un modèle de vie que François Siffrein Blanc, en fin connaisseur de la mode, a sans doute voulu faire revivre intuitivement un (pas très) beau jour de 2020. À cet instant précis, c’est un coronavirus made in China qui décidait de saboter l’économie mondiale et mettre un temps l’amour libre sous l’éteignoir, sans que l’on puisse incriminer le moins du monde Ned Ludd qui, non seulement a disparu depuis longtemps mais, de surcroît, n’a jamais existé. Tout comme les fuites d’un laboratoire à Wuhan d’ailleurs, mais l’on s’égare.  

Réduit à l’inactivité commerciale dans son showroom multimarques de mode marseillais, François décide de s’intéresser à l’accessoire qui parachèvera les silhouettes de la marque Karma Koma qu’il représente. Lui vient alors l’idée de sabots – constitutifs, aux yeux des rédactrices de mode appointées et autres influenceuses sponsorisées, du fameux style hippy chic – qu’il revampe, à l’unisson de l’esprit festif du label corse, à l’aide de cuirs aux teintes métallisées. Dûment sourcés en Suède et repimpés par ses soins, lesdits sabots font un carton. D’accessoires, ils deviennent principal et se constituent en collection sous l’étiquette un brin provocatrice Hööf. Suggérant par homophonie le vent de folie qu’ils refont souffler sur nos dress-codes estivaux, ils choisissent pour nom de baptême le mot anglais qui qualifie, non le sabot de Nottingham mais celui des ongulés, sans qu’il ne faille chercher ici une quelconque homophonie. Choix sans doute pertinent pour exprimer la liberté un peu sauvage qu’offre cette pimpante collection pour nos pieds. Le sabotage attendra.

Un look de Hööf © DRUn look de Hööf © DR

Nos Repérages Hebdo
Aluvy design. La cuisine dans le potager

Sonnez grillades, crépitez côtelettes, voici la plus streamline des cuisines d’extérieur, au colorama aussi chatoyant que les beaux jours en Méditerranée et dont l’irrésistible allure rétrofuturiste donne à vos brochettes marinées et autres sardines grillées le supplément de raffinement design propre à éloigner le spectre masculiniste du barbecue pavillonnaire. Fièrement fabriquée en Isère, remarquée au Salon Maison & Objet (qui en a fait le lauréat de son programme Future on Stage 2022) comme à la très courue Design Week de Milan, la famille Aluvy fait honneur à la qualité France et saliver nos tablées d’été. Sam, le braséro racé, Lola, la torride et sophistiquée plancha gaz, Marcel, le barbecue qui charbonne et Lulu, son alter ego gazier, une fratrie fort sympathique et au caractère bien trempé, taillée dans l’aluminium inoxydable paré d’une peinture époxy anodisée risque-tout, solidement campée sur ses quatre pieds, et que vient compléter idéalement l’ami Jean, module satellite-plan-de-travail qui vous permet d’installer une vraie cuisine en plein air et vous offrir le luxe locavore du circuit le plus court du potager à l’assiette.

L'un des 12 coloris de la gamme Aluvy © DRL'un des 12 coloris de la gamme Aluvy © DR

Taralila. Uniformes de vie

Dans les coulisses de l’Opéra de Lille où travaille sa mère, Lila Ravaloson rencontre, enfant, non un fantôme mais l’amour des costumes. Fascinée par la magie des ateliers, elle décide de lui consacrer son talent et peu à peu, son goût pour la mode l’emporte sur le formalisme inhérent à la dramaturgie, à mesure qu’elle se forme au métier et officie comme assistante styliste dans des maisons nordistes de référence (Cyrillus, Vertbaudet, Okaïdi). Résolument humaine, sa vision de la mode se teinte d’éthique lorsqu’elle découvre que les mains d’enfants façonnent parfois les vêtements que d’autres portent à l’autre bout du monde. Pour l’assumer, elle crée sa propre marque, Taralila, et trace sa voie dans la conscience actuelle qu’une autre mode est possible. Ses inspirations vont de son île natale de Madagascar, dont la filière textile démontre sa qualité face à l’industrie mondialisée, au jazz et au hip-hop qui lui inspirent un univers tout en contrastes. Sa collection actuelle, aux couleurs tranchées, au style workwear unisexe soigné, aux coupes impeccables et faciles à vivre, elle la réalise à partir de stocks dormants de tissus haut de gamme main dans la main (d’adulte) avec un atelier de réinsertion. Un style no gender personnalisable, en pré-commande, uniformes antimode durables et joyeux d’une vie à la coolitude responsable.

L'antimode à vivre de Taralila © DRL'antimode à vivre de Taralila © DR

We are jolies. And smart aussi

Florie et Prune are formidables. They have not le same âge, come from deux backgrounds différents, ne se connaissent pas each other. Pourtant, leur rencontre inattendue dans un bistrot des Halles à Paris one fine day in 2018 scelle, façon love at first sight, leur power duo professionnel et la naissance de la first french brand de culottes éthiques et inclusives ever. What does it mean me direz-vous ? Florie, qui ne connaît rien au marché de l’underwear mais a vécu de l’intérieur l’ascension d’une start-up, rêve d’entrepreneuriat et, accessoirement, de porter (on the market) la culotte féminine, de qualité et pas chère qui n’existe pas. Prune, qui elle a fait ses classes chez Chantelle, n’attend qu’un signe pour mettre à profit ses skills et s’engager dans un projet de conviction. En moins de 5 ans, We are jolies, leur brainchild, a largement confirmé sa proof of concept en devenant rentable, en connaissant une croissance régulière de son chiffre d’affaires, boosté recently par le lancement de sa collection de pyjamas, et en affirmant son statement : habiller chaque femme, all women, et not only celles, irréelles, des pages des magazines glossy ou (ex)filtrées des écrans tout puissants de l’influence marketing. Florie et Prune are combatives et, when they are not into des levées de fonds spectaculaires pour développer leur entreprise avec un pitch qui tient sur une page, they fight for the rights des jeunes entreprises françaises auprès d’un gouvernement plus sensible au charme des licornes siliconées que des fragiles lucioles dont elles ont pris la tête. Avec elles, le bottom, qu’il s’agisse de la dernière ligne de leur bilan ou de nos postérieurs plus ou moins rebondis, is definitely positive.

Maillots de la nouvelle collection We Are Jolies, été 2024 © DRMaillots de la nouvelle collection We Are Jolies, été 2024 © DR

Izaho Botanicals. Holisme malgache

L’île rouge incarne le plus tragique des paradoxes : comment un territoire aussi riche de nature peut-il être l’un des pays où les humains sont les plus pauvres ? Jean-Christophe Peyre et Anthony Rabibisoa le savent mieux que personne. Avec Floribis, ils veillent aux destinées d’un géant de la production de vanille dans le monde et sur le millier de salarié·es qu’emploie l’entreprise, pour la plupart à Madagascar. Une société aux process industriels mais à la dimension humaine, devenue premier artisan parfumeur de l’île. En se tournant vers l’univers du bien-être, avec la création d’Izaho Botanicals, les deux entrepreneurs prônent plus que jamais l’harmonie de l’humain et de la nature, selon les traditions ancestrales malgaches. En suivant une conviction : pour prendre soin des autres, il faut d’abord prendre soin de soi, ce moi que traduit le mot Izaho. Même s’ils ont une connaissance profonde des espèces endémiques de l’île, ils se sont entourés de scientifiques et d’experts de la santé pour mieux en saisir les principes actifs, qui viennent irriguer en bienfaits thérapeutiques la recherche et développement de leur laboratoire. À travers cette approche naturellement holistique qui associe intériorité, extériorité et environnement, les fondateurs d’Izaho contribuent à préserver la biodiversité, menacée à Madagascar comme sur la planète entière, tout en œuvrant à un projet d’économie sociale et solidaire, s’associant à des ONG environnementales et soutenant très concrètement des associations de cultivateurs. Et leurs produits ? Soins corporels spécifiques, blends aux plantes précieuses malgaches qui ciblent la réparation et la récupération, ou à spectre large pour une action détox et relaxation, fermeté et fraîcheur ou relipidante et apaisante, infusions de beauté intérieure ou soins signatures Duos, qui agissent dedans et dehors. Une gamme pour (se) faire du bien à découvrir sur leur e-shop.

Les blends qui font du bien dedans et dehors d'Izaho Botanicals © DRLes blends qui font du bien dedans et dehors d'Izaho Botanicals © DR

La partition créative de l’Orchestre d’Avignon

Conduit depuis 2020 par la baguette intrépide de Debora Waldman, sa directrice musicale, l’Orchestre national Avignon-Provence ne tarit pas de projets culturels excitants, consacrant une part active de son attention au jeune public comme à des programmations qui renversent les barrières de genre ou de style musical. Témoins, les 3 concerts à ne pas manquer, fruits de l’invitation faite par l’ONAP (aux côtés des orchestres nationaux d’Île-de-France et de Lyon) à Cécile McLorin Salvant, voix franco-américaine éminente du jazz actuel, détentrice entre autres de 3 Grammy Awards. Un crossover inédit et sans aucun doute éblouissant à applaudir samedi 4 mai sur la nouvelle scène de Confluence Spectacles à Avignon, dimanche 5 au Théâtre des Salins de Martigues et lundi 6 au Théâtre de Nîmes (plus d’infos ici, ici ou ). Et comme si un crossover ne suffisait pas, l’Orchestre dévoile sa nouvelle cuvée en IGP Méditerranée, produite en biodynamie et titulaire du sérieux label Demeter. Un flacon tout en harmonie, élaboré par Michel et Olivier du Domaine Miramont à Vacqueyras et né d’un partenariat noué en 2023 avec le collectif de Vignerons Engagés Rhonéa. Une démarche originale qui se savoure papilles et tympans à l’unisson.

Cécile McLorin Salvant © Karolis Kaminskas - La nouvelle cuvée ONAP x Rhonéa © DRCécile McLorin Salvant © Karolis Kaminskas - La nouvelle cuvée ONAP x Rhonéa © DR

Notre Sélection Culture


Depuis hier et jusqu’au 19 mai, le 16e Printemps de l’Art Contemporain bourgeonne à travers 60 lieux d’art marseillais et de la région qui donnent à voir quelque 150 artistes représentatifs de la création actuelle française et internationale. Entre un week-end d’ouverture avec son parcours de vernissages et événements à Marseille et un final festif à Aix-en-Provence, en lien avec la Biennale d’Aix, un foisonnement d’expos porté par le réseau PAC à cueillir en mode primeur.

Figure majeure de la modernité en peinture à la fin du XIXe siècle, Pierre Bonnard découvre, avec la vague du japonisme qui marque fortement la France à cette époque, de nouvelles perspectives artistiques qui marqueront son œuvre durablement. Mouvement, couleurs, espace plan, un bouleversement que met en lumière l’exposition Bonnard et le Japon à découvrir à l’Hôtel de Caumont, Aix-en-Provence, jusqu’au 6 octobre.

Temps fort de l’Olympiade Culturelle, programme d’envergure nationale destiné à célébrer l’événement JO Paris 2024 dans toutes ses dimensions, le projet art&sport, porté par le Frac Sud et co-produit avec le Mucem et le [mac] Marseille réconcilie l’inconciliable en un triptyque qui ne manque pas de souffle (200 œuvres et une centaine d’artistes réunis) et se déploie dans les 3 lieux. Des exploits, des chefs-d’œuvres, un titre qui montre qu’a minima, une même quête de dépassement et un puissant potentiel émotionnel traversent les deux univers. À voir jusqu’au 22 décembre.

Pierre Bonnard, Conversation provençale, 1911-1927, huile sur toile, National Gallery Prague. Photo akg-images-Erich LessingPierre Bonnard, Conversation provençale, 1911-1927, huile sur toile, National Gallery Prague. Photo akg-images-Erich Lessing

Nos Actus Soudaines

Les 4, 5 et 6 mai, une nouvelle pluie d’étoiles s’abat sur Saint-Tropez. 78 chef·fes, venus rendre hommage à leurs artisans de l’ombre, ceux sur lesquels reposent toute leur philosophie gastronomique qui sacralise le produit : les producteurs et, tout particulièrement, ceux qui cultivent le terroir et le savoir-faire de la Presqu’île. Tout le programme par ici.

Décidément, le collectif (La)Horde à la tête du Ballet national de Marseille ne cesse d’étonner. Recommandé par Lucinda Childs (légende de la danse contemporaine) auprès d’Annie Leibovitz (légende de la photographie), il assure la direction chorégraphique d’une série photo commandée par Anna Wintour (légende de la mode) featuring l’actrice Zendaya (légende sans doute pour les plus jeunes d’entre nous). Résultat, la couverture de Vogue US du mois de mai. Bluffant. Tout comme s’annonce sa collaboration avec le metteur en scène Ivo van Hove pour une création intitulée I want absolute beauty qui met en scène Sandra Hüller (Anatomie d’une chute) sur une musique originale de PJ Harvey. Et pour approcher d’un peu plus près leur univers, précipitez-vous avant dimanche soir au CCN Ballet de Marseille, 20, bd de Gabès dans le 8e, pour la grande vente de costumes et d’accessoires issus des productions de la maison, depuis Roland Petit jusqu’à (LA)Horde.

De son propre aveu, Jean-Paul Gaultier doit sa vocation au cinéma, à commencer par le film Falbalas de Jacques Becker. En assurant la direction artistique de l’exposition Cinémode, réalisée en collaboration avec la Cinémathèque Française et présentée dans les espaces du Savannah College of Art and Design à Lacoste, le créateur témoigne de son amour cinéphile, illustré par les costumes qu’il a lui-même créés pour les plateaux ou la scène.

Si vous n’aviez pas votre carton pour le défilé Croisière 2024 de Chanel hier à Marseille, consolez-vous. Le 19M, ruche des maisons d’art affiliées à la grande maison et d’ordinaire installée entre Paris et Aubervilliers dans un bâtiment signé Rudy Ricciotti, transporte sa galerie pour une résidence éphémère au Fort Saint Jean. Expo collective, tables rondes, ateliers, une programmation qui explore les liens entre création contemporaine et savoir-faire conçue par un aréopage de personnalités créatives marseillaises. À suivre jusqu’au 26 mai.  

Et pour finir, notre bonus musical de la semaine, hommage électrifié un peu cabossé, californien et pour tout dire apocryphe à nos sabots marseillais, héros de la semaine. Enjoy!

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